INVESTISSEMENT & ÉQUIPEMENTS MUNICIPAUX
Conseil municipal de Mérignac - Séance du 24 juin 2019 à 18h00Intervention de Thierry MILLET sur le sujet
Monsieur le Maire, mes chers collègues, je vais vous faire part de nos remarques en ce qui concerne le volet investissement du compte administratif.
Commençons, si vous le voulez bien, par vos motifs de satisfaction.
Il y a d'abord le taux de réalisation des investissements inscrits au budget
Vous vous enorgueillissez du taux prévu de 62% sur ce mandat en le comparant à celui de 55% sur le mandat précédent où vous étiez en charge des finances. La seule conclusion à tirer de ce chiffre est que la situation est moins mauvaise qu'auparavant mais que ce taux est insuffisant. Vous continuez à inscrire au budget des projets que vous ne réalisez qu'à moins des deux tiers. En clair vous continuez à pratiquer la politique de l’affichage quand les familles mérignacaise attendent une politique de réalisation.
Vous mettez aussi en avant la capacité de désendettement de la ville et son autofinancement à 70%.
Vous semblez émerveillé par ces soi-disant "prouesses de gestion". En réalité, cela montre surtout l’incapacité de la municipalité à mener des projets. Un coup d’œil au tableau des dépenses réelles d’équipement suffit à le confirmer : en dehors de la maison de la petite enfance Simone Veil pour 1,8 millions, la ville n’a réalisé en 2018 aucun nouvel équipement. La section investissement est essentiellement composée de travaux de reconfiguration, d’entretien ou de réfection, un peu de matériel, des honoraires… sans oublier 1,4 millions pour nourrir le gouffre de la Maison carrée.
A l'échelle de Mérignac, 1,8 millions, cela représente 1,8% des 100 millions du budget de la ville, c'est à dire pas grand chose...
Bien sûr, si les constructions municipales sont rares, on ne peut pas en dire autant en matière de constructions immobilières puisque le béton a continué à couler à flots depuis 2014, favorisant ainsi la croissance de la population.
Une capacité de désendettement certes forte
Dans ce compte administratif il existe un indice qui confirme qu'à Mérignac, l'investissement est faible, pour ne pas dire faiblard. On le trouve au chapitre "charges financières" du rapport de présentation : il s’agit de la capacité de désendettement. Le chiffre est parlant : 8 mois. En général, cette capacité se mesure en années. A Mérignac, elle est mesurée en mois.
Cela signifie que si vous n’avez aucun besoin d’emprunter c'est parce que vous réalisez peu.
En général, les communes livrent leurs nouveaux équipements en fin de mandat. C’est logique puisque les projets lancés en début de mandat demandent 3 ou 4 ans avant de sortir de terre. Les paiements s’échelonnant au fur et à mesure des réalisations et le recours à l’emprunt tend à maintenir le niveau l'endettement, surtout quand il faut résorber une carence d'équipements. A Mérignac, c’est le contraire. C’est même le decrescendo de l’endettement : 1,4 année en 2016, 11 mois en 2017, et 8 mois en 2018.
Quand on construit peu, il y a peu de besoins de financement.
Vous nous direz certainement que Mérignac a fait le choix de projets ambitieux, et donc, longs à réaliser, comme par exemple le stade nautique et que ce genre de projet prend du temps.
Dans ces conditions, pourquoi avoir promis cet équipement aux mérignacais alors que, six ans après, la date du premier plongeon est loin d'être fixée... La raison de cette situation est intéressante. En réalité, vous avez imaginé cette promesse de campagne pour marquer les esprits, et vous avez survolé la question de sa faisabilité. Petit à petit, une fois passé le moment de ravissement qui a suivi les dernières élections municipales, vous avez fini par ouvrir les dossiers. Et là, faute d'anticipation, vous avez découvert des problèmes que vous n'aviez pas prévus. (Par exemple, qu'il n'était pas possible de priver les mérignacais de piscine pendant la durée des travaux). D'où le retard conséquent que nous constatons aujourd'hui.
Quant au conservatoire, il ne sera pas livré de sitôt...
Nous constatons que, pour l'instant, les réalisations phares du mandat sont avant tout décrites par vos mots, avec tout le talent oratoire dont M. le maire sait faire preuve. Mais elles restent à l’état de concepts, laissant les mérignacais dans l'attente.
Les ré-inaugurations de réalisation déjà existantes.
On notera à ce sujet que vous faite preuve d’imagination pour donner le change. Ainsi, pour remplacer les inaugurations d’équipements nouveaux, vous les remplacez par des pseudo inaugurations.
- Par exemple, vous avez, en quelque sorte, réinauguré la médiathèque à l’occasion de sa nouvelle dénomination
- Vous avez aussi inauguré le parc Victor Schoelcher qui n’est en fait qu’une subdivision du parc de Bourran.
Demain, nous inaugurerons le Point d’accès au droit, réalisation sans aucun doute nécessaire mais dont l’ampleur ne va pas changer l’inventaire des équipements de notre commune.
Attention, nous ne vous disons pas qu'il n'aurait pas fallu dénommer notre médiathèque du nom de notre ancien maire. De même nous reconnaissons l'utilité de l'espace Victor Schoelcher et du point accès au droit.
Non, ce que nous vous disons, c'est que l'investissement à Mérignac est notoirement insuffisant.
Pour vous défendre, vous nous direz peut-être, je vous cite, qu'en « en se désendettant, la ville pourra plus facilement et sans risque financer ses futurs projets ». Problème : vous teniez déjà ce discours à la fin du mandat précédent. Depuis, rien de nouveau à part une forme de sur-place.
Comme vous l’avez fait en décembre dernier, vous nous répéterez peut-être aussi que, je cite encore M. le maire, que « votre ambition est d’augmenter l’investissement, que vous êtes d’accord sur le fait que cela va trop lentement et qu’en 2019 les chiffres vont enfin devenir un peu plus satisfaisants ». Dans ces conditions, pourquoi avez vous attendu jusqu'à maintenant pour envisager de redresser la situation ?
Peut-être encore nous entendrons-vous vous étonner que l’opposition face l’apologie de l’endettement ? Je tiens à vous rassurer. Nous ne confondons pas endettement et surendettement. Pour nous, l’emprunt est un outil qui permet d’étaler le financement des projets. C’est son abus qui est nuisible. Lorsqu’une ville a des besoins criants, comme c’est le cas à Mérignac, ne pas utiliser cet outil alors que les taux d’intérêts sont historiquement bas est une faute.
Et nul ne pourra dire, comme vous avez osé le faire lors du débat sur le BP 2019 que, je cite à nouveau M. le maire, « la ville n’est pas là pour financer les banquiers » ou encore « accepter l’endettement, c’est donner de l’argent aux banquiers puisqu’il faut payer les intérêts. Or, cet argent-là peut servir à autre chose ».
En effet, même sans lire la presse économique, chacun sait qu’un banquier qui prête avec le niveau très bas des taux actuels est, si vous me permettez l’expression « au pain sec et à l’eau », c'est à dire que ses gains sont réduits à la portion congrue.
Sur ce point, nous avons besoin de vous comprendre :
Soit, M. le maire a prononcé cette phrase pour se présenter comme un "adversaire de la finance" et faire une opération politique en attirant à lui la sympathie d’une partie du conseil municipal. Pour ma part, je ne le crois pas vouloir agir ainsi.
Soit, la majorité vit déconnectée de l’économie réelle et laisse filer l’opportunité de rattraper le retard d’équipements en se procurant de l’argent à bon compte. Ce serait étonnant car vous êtes conseillés et informés.
Soit, tout simplement, vous n’aviez jusqu'à présent rien à financer dans vos cartons, ce qui est le plus probable.
La section d’investissement du compte administratif est symbolique de votre façon de gérer.
Elle révèle le décalage entre la réalité de votre politique et les besoins de la population de chaque quartier de Mérignac
Elle démontre surtout l’aspect contradictoire de la politique que vous suivez : vous ne pouvez pas faire à la fois la course à la croissance de la population et ne pas agir pour adapter les services et les équipements aux besoins !
D'aucuns pourront penser que ces critiques sont sévères.
Peut-être existe-t-il un moyen de vérifier si l'opposition est fondée dans ses remarques ?
Le compte administratif démontre que notre commune investit très peu.
Dans ce document officiel, il suffit de comparer les performances de notre ville à celles des communes de mêmes strates. Les dépenses d'équipement par habitant ne représentent pas la moitié de celles des autres communes de même strate : 143 € à Mérignac contre 326 € dans les autres communes comparables. Le décalage de Mérignac est accablant. Mais vous direz que la métropolisation perturbe la lecture de chiffres...
Alors, voyons le compte administratif de communes de taille significative situées dans la Métropole, par exemple Talence et Pessac. Là, le constat est le même. Quand Mérignac investit 143 € par habitant, Pessac en investit 252 € et Talence 351 €.
Vous nous direz surement que ces communes rattrapent un retard ou que ces chiffres sont conjoncturels.
La carence d'équipements municipaux.
En nous reportant au conseil du mois de décembre dernier, lorsque nous avions voté deux schémas directeurs ambitieux qui montrent à quel point les besoins de notre ville sont nombreux tant en ce qui concerne le sport qu'en ce qui concerne les équipements scolaires et d'accueils de loisirs. La lecture de ces deux documents démontre le retard pris par Mérignac en matière d'équipements. Dans ce domaine, notre ville n’est pas à la hauteur de ses ambitions.
Les retards de livraison de nouveaux équipements et un investissement minimaliste (alors que le population est en croissance) dessinent un tableau mérignacais très sombre.
Ce compte administratif démontre que l'action de la municipalité n'est pas à la hauteur des enjeux.
Hier, alors que vous pilotiez les finances de la ville, Mérignac avait déjà pris du retard.
Aujourd'hui, votre mandat va s’achever avec un retard encore plus grand.
Or, nous le savons : quand les équipements manquent, ce sont les services à la population qui baissent.
Nous ne cautionnons pas cet aspect de votre politique.
C'est pourquoi nous ne voterons pas ce compte administratif